Ce 9 mai, journée de l’Europe, est l’occasion de marquer ensemble un moment historique, particulièrement cher aux européens, qui a permis à des femmes et des hommes, à l’issue d’affrontements sanglants, d’inspirer une aventure de coopération profonde, sans nul autre précédent, dans un souci de paix et de prospérité pour nos populations respectives.
Après une guerre qui a laissé notre continent exsangue, avec des haines et des ressentiments tenaces entre européens, ce projet pouvait sembler utopique et certainement un pari, à l’époque, loin d’être gagné. En dépit des méfiances, des moments de recul et de doute, les pionniers de cette construction européenne ont pressenti que l’avenir de l’Europe allait se jouer non pas en oubliant, mais en dépassant nos divisions ; sans toujours s’aimer, mais en tout cas en s’écoutant et en se respectant ; sans nier nos différences, mais en s’en servant afin de bâtir sur cette diversité qui constitue notre force.
Nous sommes fiers d’être « Unie dans la diversité », comme le veut notre devise. Bien sûr, pour autant, les défis sont là. Le Brexit, les résurgences nationalistes, le Covid, l’impact de plus en plus ressenti du changement climatique et l’urgence d’accélérer la transition énergétique.
Aujourd’hui, c’est l’invasion non provoquée des forces armées de la Fédération de la Russie en Ukraine aux portes de l’Union européenne qui domine nos préoccupations. Comme l’a dit la Présidente de la Commission européenne, Mme Von der Leyen: « Notre continent revit aujourd'hui les heures sombres d'un passé que nous croyions révolu. »
Lors de la conférence internationale de haut niveau des donateurs pour l'Ukraine, la Présidente a déclaré : « La brutalité de l'agression russe choque le monde entier. Je l'ai effectivement vue de mes propres yeux lorsque j'ai visité Kyiv. Et je suis allée à Boutcha avec vous, Denys [Denys Shmyhal, Premier ministre de l'Ukraine], pour voir les charniers, pour voir les sacs qui contenaient des cadavres, pour voir les plaies et les blessures dans les maisons et les hôpitaux qui ont été bombardés, les jardins d'enfants, les écoles. C'est atroce. C'est un crime de guerre que la Russie commet jour après jour. Et pour cette raison, nous nous tenons à vos côtés. Nous ne pouvons pas égaler la bravoure et le sacrifice du peuple ukrainien, mais nous pouvons vous apporter notre soutien; nous pouvons vous aider, nous pouvons nous tenir à vos côtés. »
L’Europe est unie en soutien à l’Ukraine. Avec nos partenaires internationaux, nous continuerons à fournir un appui massif - économique, financier, humanitaire et en faveur des forces armées ukrainiennes. Nous continuerons d’accueillir les millions de réfugiés qui ont fui vers l’Europe. De façon coordonnée avec les Etats Unis et le Royaume Uni et d’autres, nous avons adopté le paquet de sanctions le plus important de notre histoire, et le coût pour l’économie russe et le Kremlin sera très lourd.
Les impacts internationaux de cette invasion sont bien là, y compris ici en Mauritanie, où la flambée des prix des produits alimentaires vient s’ajouter à une saison agricole déjà rendue difficile par les effets du changement climatiques et alors que les pressions inflationnistes étaient déjà là.
Donc je souhaite souligner que cette guerre en Ukraine, aux portes de l’Union européenne, ne nous détourne pas - bien au contraire - de notre volonté de partenariat avec la Mauritanie. Elle ne nous détourne pas de notre engagement aux côtés des pays du Sahel dans la lutte pour la paix, la sécurité et le développement, quelles que soient les difficultés du moment.
Cette année s’est tenue en février le Sommet Union Européenne - Union Africaine. Je rappelle la volonté qui s’est dégagée de mettre en place un nouveau paquet d’investissement, le Global Gateway, pour générer 150 milliards d’euros d’investissements en Afrique, pour une croissance verte, digitale et inclusive.
Et nous le faisons déjà. Le pont de Rosso, qui va relier la Mauritanie au Sénégal, financé à 50% par l’UE, avec le soutien de notre banque à nous, la Banque européenne d’Investissement, en est un exemple parmi beaucoup d’autres, mais tout de même un exemple emblématique.
Générer ce niveau d’investissement externe ne peut que passer par une action forte des Autorités nationales. Il faut des réformes robustes qui accélèrent les transformations, le progrès social, le climat des affaires. Cela exige aussi bien sûr le renforcement de l’Etat de Droit, et de la prévisibilité.
C’est donc bien ensemble, via un partenariat profond et efficace qu’on pourra y arriver. L’Engagement de l’Europe sur ce chemin est très fort. Nous avons tenu une conférence de presse avec le Ministre de l’Economie [9/5/22], pour annoncer notre engagement à financer des programmes et des initiatives à hauteur de 125m€ entre 2021 et 2024, pour renforcer le développement humain, soutenir des secteurs clés comme l’agriculture et l’énergie, et pour renforcer la bonne gouvernance.
A nos fonds de coopération viennent s’ajouter d’autres appuis majeurs. Notre nouvel Accord de Pêche, d’une grande valeur mutuelle. Nos appuis à vos forces de sécurité pour soutenir la paix, alors que la situation dans le Sahel et au Mali voisin est si difficile. Car nous savons tous que sans sécurité, sans paix, il ne peut y avoir de développement.
Ces efforts de l’UE se feront main dans la main avec nos Etats Membres présents ici sur place – l’Allemagne, l’Espagne et la France. Nous avons justement bâti nos programmes pour qu’ils se complémentent, pour en augmenter l’impact. Notre marque de fabrique est l’Equipe Europe.
Notre volonté est de mener des actions qui changent les vies.
Comme le Point de débarquement aménagé duquel nous avons posé la première pierre avec le Ministre de la Pêche le 9 mai. Cette infrastructure exceptionnelle à 100km de la capitale, à Leghweichich, permettra de créer une chaîne de valeur du poisson - le congeler, le sécher et le transformer. Et sur place, dans ce village de pêcheurs qui deviendra un pôle de développement économique et social, la construction d’uneécole et d’un poste de santé sont déjà en cours.
Comme ce « DataCenter » qu’a inauguré le Président de la République qui permettra à la Mauritanie d’être à la pointe pour la gestion et le stockage des données, pour digitaliser l’économie et tirer le profit développemental du numérique.
Comme nos actions en faveur des droits humains.
Ce sont là des preuves très tangibles de la force de notre partenariat. Car nous avons des ambitions communes, et nous avons des intérêts communs. Une Mauritanie forte, stable, et pourvoyeuse d’emplois et de services pour ses citoyens – c’est ça l’intérêt de l’Europe. Car nous sommes presque voisins, notre géographie est commune, nous partageons beaucoup de choses : votre prospérité, stabilité et développement sont donc des enjeux clés pour nous.
Soyez sûr de notre engagement, pour la Mauritanie, pour le Sahel, et pour l’Afrique. Comme l’a dit le Président du Conseil européen Charles Michel, à l’ouverture du Sommet Union européenne- Union africaine, en février dernier : « Il n'y aura pas de monde stable, ni d'Europe sûre, sans une Afrique stable, sûre et prospère. »
Gwilym JONES,
Ambassadeur de l’Union européenne
