La longue saga de la collecte des ordures à Nouadhibou se poursuit… il faut dire que le sujet ne sent pas très bon…
Nouadhibou et sa Zone Franche, théoriquement Pôle touristique balnéaire majeur du pays, se noie depuis des années sous les déchets qui recouvrent des pans entiers de la ville et de la côte. Faisons un bref rappel.
Au cours de l’été 2021, en pleine pandémie covid-19, la Zone Franche annonce une future consultation internationale pour la présélection d’une entreprise en charge de collecter les déchets solides de la ville, le constat est évident pour tous, population et Zone franche incluses, le système jusque-là mis en place est désastreux.
Une situation intenable pour Nouadhibou
Accumulation des ordures dans toute la ville, risques sanitaires et même d’incendies pour les grands dépôts sauvages… le bilan des acteurs impliqués, autorité comme entreprises prestataires, est une honte. Une situation qui d’ailleurs dissuaderai les plus aventuriers des investisseurs comme les moins exigeants des touristes à s’installer à Nouadhibou.
Poursuivons. Septembre 2021, la présélection internationale en vue du lancement prochain de l’appel d’offre est officiellement ouverte. Les entreprises intéressées répondent au cahier des charges. Moins d’une dizaine de sociétés ou groupement sont retenus. Et magie de la présélection, la plupart sont les mêmes acteurs qui sévissent dans la ville depuis des années, avec le peu de résultats que l’on connait.
Mais que se passe-t-il en coulisse ?
Le Dossier d’Appel d’Offre est finalement disponible, à peine les sociétés présélectionnées prennent connaissance du document distribué par la zone franche, qu’il leurs ai demandé de ne pas le prendre en compte et de retourner dans l’heure les documents. Seule explication : un nouveau dossier leur sera communiqué, ultérieurement. Mais que se passe-t-il en coulisse ? Précipitation ? Incompétences ? Influences externes ? Que de questions qui resteront sans réponses.
Les entreprises candidates auront été surprises étant donné que les caractéristiques techniques comme le volume de matériels et de personnels n’ont rien à voir avec ce qui était initialement demandé lors de la présélection, avec au bas mot une multiplication par 3. Impliquant de fait une complète réévaluation de l’offre à établir.
Le « Mousselsel » de la Collecte des Déchets de Nouadhibou
Une version corrigée sera finalement distribuée. Retour peu ou prou aux conditions initiales. Les entreprises postulent. Janvier 2022, un groupement sort vainqueur , il ne s’agit pas d’une des cinq entreprises historiques du secteur qui se partageaient la ville.
Lueurs d’espoir et fin de l’histoire me direz-vous, c’est sans compter le nouvel épisode du « Mousselsel » de la Collecte des Déchets de Nouadhibou, qui connait un nouveau rebondissement. Tenez-vous bien ! Suspension par la commission de régulation de l’attribution pour non-respect du délai légal d’attribution faisant suite aux réclamations des perdants.
Et c’est reparti pour un tour, le DAO déclaré infructueux, la prochaine saison est lancée. Le temps passe. Les ordures s’accumulent.
Nouvel appel d’offre
Finalement, nouvelle annonce d’Appel d’Offre à l’Internationale en septembre 2022. A nouveau les entreprises s’agitent, alors qu’étonnamment la Zone franche vient de renouveler un contrat pour une zone de collecte avec une société et de remplacer pour une seconde zone une autre société par une nouvelle fraichement arrivée à Nouadhibou, le tout peu de temps avant le lancement de ce nouvel Appel d’Offre.
Un DAO très exigeant
Le nouveau DAO est très exigeant tant sur les ressources humaines que sur la logistique, ressemblant étrangement à la version retirée à la va vite un an plus tôt lors de la saison 1. De plus le volume de déchets à évacuer explose. Le premier DAO laissait une estimation aux alentours de 120 000 m3 par an, cette fois le volume exigé est 297 500 m3 au total, 150 000 m3 par an pour la collecte à domicile et de 47 500 m3 pour l’évacuation des dépôts sauvages accumulés, modestement nommé « mise à niveau », soit l’équivalent de plus d’un tiers de la production de déchets annuels qui sont répandus dans la ville (la zone des rails et le long de la nouvelle piste dans la lagune menant vers les cabanons).. A-t-on déduit pour autant d’un tiers les paiements aux sociétés chargées de ce travail ? Non. Rappelez-vous, elles ont toutes été présélectionnées lors du précédent Appel d’Offres, avec pour certaines une évaluation technique à 100%, soit le maximum...
Le contrat ne rétribuant pas en fonction des quantités évacuées vers le centre d’enfouissement, un prix forfaitaire sur cette base doit être établi par les candidats.
Nouveau rebondissement lors de la réunion des candidats préliminaire à la visite des lieux. Il leur est annoncé qu’un correctif sera communiqué dans les jours qui suivent.
Les grandes hésitations
La correction arrive, les entreprises jusque-là ne devaient certainement pas savoir comment répondre aux demandes démesurées de la première version du cahier des charges, pensez un peu, il était demandé 356 employés et une flotte de véhicules et de moyens dimensionnés pour une mégapole! Certainement destinée à faire pâlir de jalousie la communauté urbaine de Nouakchott…
Mais même après correction à titre d’exemple, l’entreprise bénéficiaire devra contractuellement disposer d’un personnel 234 individu, soit à temps plein au bas mot un budget moyen de 234x125000*12 = 35 100 000 MRU/an sic !. En termes de matériel, je vous épargne le détail des estimations, mais il faudrait se doter d’un matériel pour un montant d’investissement estimé à plus 40 million de MRU alors que le contrat n’est que de 1 an, certes renouvelable mais sans fixer les critères de renouvellement. Et, ce n’est pas tout, il faut ajouter les frais de fonctionnement, gasoil pour l’ensemble du parc roulant, la maintenance, les charges, les impôts et espérer dégager un bénéfice … Non vous n’avez pas le vertige, nous flirtons raisonnablement ici avec les 100 millions de MRU annuel un milliard d’ancien ouguiyas.
Le hasard fait bien les choses ou la magie de l’expertise
Vous avez tous les éléments de réflexion ou presque. Le jour J arrive, les offres ont été déposées. Pourtant, à l’issue de la réunion des membres de la commission, c’est l’entreprise mauritanienne Vamm, en groupement avec le marocain SOS, qui obtient le marché pour une durée d’une année avec un montant de 52 380 000 MRU HT. Soit la moitié de ce que devrait couter le marché, le hasard fait bien les choses ou la magie de l’expertise. Vamm, un acteur historique expert de la collecte des ordures de Nouadhibou, demandez à la population.
Une bonne chose pour le trésor public dira-t-on, mais Quand on jette un coup d’œil sur le dossier d’appel d’offre, on se pose la question suivante : Cette firme a-t-elle cassé le prix afin de remporter le marché a tout prix, au détriment de la qualité de service ?
Pourquoi ne pas communiquer le prix unitaire au M3 ? Le prix réel du marché sera-t-il rendu public avec les détails des quantités contractuelles à évacuer dans un souci de mettre en œuvre une vraie transparence ?
Sans cela la société civile sera toujours se poseront une question légitime : Les procédures légales, ne sont-elles pas, au final, un verni maquillant un système opaque dans lequel les cahiers des charges ne sont pensés que pour éliminer les éventuels concurrents et garantir, par la sacro-sainte doctrine du moins disant, l’octroi de marchés indus ?
Le marché fait l’objet actuellement d’une suspension de la part du comité de régulation de la zone franche suite aux recours du Groupement TOP ECTP AMOAL - AMDER.
Rappelons que cette entreprise mauritanienne Vamm est déjà bénéficiaire d’un contrat gré à gré obtenu avec la zone franche de Nouadhibou pour le nettoyage du quartier Lareiguib.