Le classement annuel de Reporters Sans Frontières (RSF) sur la liberté de presse dans le monde adopte un ensemble d'indicateurs et de critères, sur lesquels, il se réfère pour établir une moyenne pour chaque pays, comprise entre 0 (la note la plus élevée en matière de liberté) et 100 points, qui est la plus mauvaise note en matière de musèlement de la presse.
L'organisation prend en considération dans son classement, les points de vue d’experts en droit, en information et en sociologie, choisis chaque année, auxquels elle adresse un questionnaire de 16 pages, contenant des centaines de questions, cernant tous les aspects se rapportant à la liberté d'expression.
C’est sur la base de ces réponses, qui ne se hissent pas à leur spécificité d’opinions strictement personnelles, qui peuvent ne pas être nécessairement objectives -, en plus d’autres données relatives aux lois régissant l’espace médiatique et les outils démocratiques, permettant à RSF de disposer de points sur l’Etat concerné.
C’est partant de ces points, calculés suivant des formules mathématiques complexes, que l’organisation dégage une note du pays, dans le domaine de la liberté d’expression.
Ce qui nous intéresse ici, ce sont les indicateurs et critères adoptés par RSF dans son classement de la Mauritanie.
Un classement que je considère injuste et ayant pris en considération, dans certains de ses divers aspects, des informations erronées.
Il était également par endroits, une conséquence directe de positions souveraines prises par l'Etat mauritanien, prises sur la base de ses convictions et ses intérêts, en partie à propos de l’incident terroriste de « Charlie Hebdo », en 2015 et de l’affaire de l’auteur du blasphème , Mohamed Cheikh Ould M’khaitir (Adoption de la loi portant sur la peine de mort, sans possibilité de repentir à toute personne accusée d’apostasie, pour agression de Janab la loi du Prophète mort Hérétique - Novembre 2017) .
Parmi les points soulevés dans le rapport de l'Organisation en 2018, et qui ont conduit au classement du pays à la 72ième place dans le monde et à la première dans les Etats arabes, notre rang a légèrement baissé de 2,6 points (passant de 29,09 au lieu de 26,49 l'an dernier), ce qui maintient la Mauritanie au même rang, en sa qualité de pays sans danger pour les journalistes, selon le rapport.
Dans son résumé sur la Mauritanie, RSF dit :
Peine de mort pour les apostats et les auteurs de blasphème : depuis 2014, la Mauritanie connaît une forte régression en matière de liberté de la presse contrairement aux grandes avancées que le pays avait réussies à réaliser les années précédentes. En novembre 2017, un projet de loi, qui punit de la peine de mort l’apostasie et le blasphème, même en cas de repentir, a été adopté. Ce durcissement est survenu après que le blogueur Mohamed Cheikh Ould Mohamed Mkhaïtir, en détention depuis près de trois ans, a vu sa condamnation commuée en une peine de deux ans d’emprisonnement. Censé être libérable, il est néanmoins maintenu en détention secrète le temps que la Cour suprême examine son cas avec le risque que la nouvelle loi soit finalement rétroactive.
Cybercriminalité : De même, la loi sur la cybercriminalité de décembre 2015 ne fait pas d’exception pour le partage et la diffusion d’informations relevant de l’intérêt général et prévoit de lourdes peines de prison en cas de diffamation. Elle annule également d’anciennes législations visant à protéger les journalistes utilisateurs de technologies numériques.
La peur des journalistes de représailles : l’essentiel des journalistes s’autocensure quand ils doivent couvrir des sujets tels que la corruption, les militaires, l’islam ou l’esclavage – qui existe encore dans ce pays. Cette censure est renforcée par les pressions financières des autorités qui suspendent cinq chaînes de télévision et de radios privées depuis octobre 2017 pour limiter les voix critiques »
Tout acteur qui suit les médias mauritaniens réalise clairement le caractère faux de ces affirmations, qui ne s’appuient sur aucun fondement. Ce qui nous conduit également à s’interroger sur la crédibilité des sources de RSF, pour certaines questions liées à la situation dans le pays.
Ce qui requiert de la part de l'organisation de vérifier ses informations à l’avenir et d’authentifier les données obtenues avant leur adoption et leur publication, surtout que RSF a cité dans ce contexte, un sujet se rapportant à un photographe français d'origine marocaine, arrêté pour avoir enfreint les lois du pays et non en sa qualité de « journaliste » - alors qu’il ne porte pas sur lui ce titre ; sachant par ailleurs que nous avons les cas de dizaines de journalistes qui entrent légalement chaque année dans le pays et réalisent librement leurs rapports..
Enfin, RSF évoque dans le même sujet, des pressions financières qui avaient conduit à la fermeture de Radios et de Chaînes télévisées depuis octobre 2017.
Cette information est évidement inexacte, puisque ce cas se rapporte exclusivement à des chaînes de télévision commerciales et à aucune Station Radio.
Ce cas n’est pas par ailleurs le résultat de persécution des autorités, du fait qu’étant tel, l’une desdites chaînes TV n’aurait pas repris ses programmes, après s’être acquittée d’une faible part des dettes de la TDM, bien qu’il s’agisse d’un média audiovisuel à connotation politique et donc ne pouvant en aucun cas être compté sur les rangs du Gouvernement.
En conclusion, le rapport a omis certaines réformes réalisées au cours des dernières années et qui renforcent et consacrent la liberté d'expression et dont le plus important de l'adoption de la loi sur la publicité, l’organisation des états généraux de la presse…
Si RFD tient compte de ces données, la Mauritanie serait incontestablement au diapason des Etats qui respectent pleinement la liberté d'expression. ..
Ahmed Issa Yedaly, journaliste mauritanien
* NB : Vis strictement personnel
Repris de l’Arabe par Md O Md Lemine