Ses partisans crient à l’intimidation du pouvoir. Son avocat exige sa libération immédiate et accuse le pouvoir de vouloir bâillonner et éteindre la voix de Biram Dah Abeid. Depuis sa cellule de Nouakchott, le militant antiesclavagiste mauritanien annonce la préparation d’un procès politique.
«On résiste, on résiste», scandent ses partisans. Ils étaient quelques dizaines à manifester mardi à Nouakchott pour demander la libération de leur chef.
Après six jours de garde à vue, Le président du mouvement abolitionniste mauritanien (IRA), Biram Dah Abeid a été inculpé et écroué lundi à la prison centrale de Nouakchott, à la suite d’une plainte d’un journaliste mauritanien qui l’accuse de calomnie, d’injures et d’incitation à la haine.
«J’ai passé deux semaines sans dormir»
Le journaliste Daddah Abdallah, à l’origine de la plainte, a réalisé il y a plusieurs semaines, une interview avec le dirigeant de l’IRA. Après sa diffusion, les deux hommes ont eu un profond désaccord sur le contenu éditorial du document.
«Monsieur Biram Dah Abeid a distribué des messages sur les réseaux sociaux à ses partisans, les incitant à m’attaquer. J’ai passé deux semaines avec ma famille sans dormir parce qu’il avait distribué mes numéros de téléphone à ses partisans», explique le journaliste à TV5 Monde.
«Un montage vidéo… d’un agent provocateur»
Depuis sa cellule de la prison centrale de Nouakchott, Biram Dah Abeid a rédigé une lettre dans laquelle il reproche à son accusateur d’avoir dérogé à son rôle de journaliste pour jouer ouvertement le rôle d’un agent provocateur. Et d’avoir réalisé un montage vidéo à charge, de la même veine que ceux produits par les services de renseignement mauritaniens envers son mouvement.
«Oui, on me prépare un procès politique, dans la droite ligne des enseignements du passé», écrit Biram Dah Obeid. Un procès qu’il affirme aborder «avec aplomb et l’insolence de (sa) certitude en la toute puissance de l’opprimé, quand sonne l’heure de sa libération.»
Pour les proches du militant antiesclavagiste mauritanien, cette affaire a été montée de toutes pièces. Ils affirment qu’il s’agit de barrer la route à leur président qui se présente aux élections législatives du 1è septembre.
«Une arrestation à deux jours du début de la campagne. Ça ne peut pas être le fait du hasard. Nous continuons notre campagne et nous espérons mobiliser le maximum de Mauritaniens pour que Biram puisse être élu. Nous avons déjà poursuivi la lutte pendant qu’il était emprisonné pendant deux ans. Le mouvement n’a pas failli. En prison ou pas, nous continuons le combat.», a indiqué El Hadj Fall, porte-parole de Biram Abeid sur le plateau de TV5 Monde.
«Un coup monté judiciaire» pour bâillonner un candidat
C’est aussi le sentiment de William Bourdon, l’avocat français du militant antiesclavagiste mauritanien. Interrogé par RFI, il dénonce «un coup monté judiciaire». Pour lui, l’incarcération de Biram Dah Abeid fait partie de la campagne d’intimidation et de persécution à l’encontre de toutes les voix dissidentes en Mauritanie.
«On veut bâillonner et éteindre la voix d’un candidat. Pas seulement un militant antiesclavagiste, mais aussi un homme politique qui incarne une alternance. C’est cette voix que le régime du président Aziz veut à tout prix bâillonner et faire taire. C’est une plainte totalement fabriquée», affirme l’avocat qui demande la libération immédiate et sans conditions de son client.
Le président de la commission nationale électorale mauritanienne a tenu à rassurer les uns et les autres. Il a annoncé que le dossier de candidature déposé par le président de l’IRA était complet et valable et que la CENI ne pouvait que valider la candidature de Biram Dah Abeid. Reste à savoir comment il compte s'y prendre pour battre campagne depuis sa cellule.
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