Il arrive que des circonstances motivées vous amènent à ne pas évoquer un événement douloureux au moment même où il se produit. La mort de l'éminent écrivain Mohamed Yehdhih ould Breidleid est une immense perte au plan purement gnoséologique, au-delà des considérations politique, idéologique etc....
Comme l'oiseau de Minerve symbole de la connaissance "ne prenant son envol qu'à la tombée de la nuit"Ould Breidleil pourtant figure de proue de l'univers littéraire, ne s'est jamais vanté d'avoir été le "premier qui a fait descendre la poésie du Montparnasse".Baathiste, panarabiste il le fût en tout cas.D'ailleurs peut-on reprocher au poète Senghor d'avoir été un chantre de la négritude en immortalisant la beauté de sa muse Coumba Ndofène Diouf,à Aimé Césaire d'avoir détesté le colonialisme jusqu'à sa mort en Martinique, à mon compatriote Samba Thiam de défendre les negro-mauritaniens ?
Personnellement c'est le côté théorie de la connaissance qui m'intéresse chez le défunt. Après Hampaté Ba ou Senghor,aucun auteur africain ou arabe n'a suscité chez moi tant d'intérêt pour la lecture que l'écriture raffinée oh combien envoûtante voire militante de Ould Breidleil.Je me pose toujours la question comment un bédouin comparable à l'immense culture d'un Michel Jobert, la plume d'un Paul Valéry puisse "sans tambours ni trompettes "des décennies durant tenir en haleine toute une intelligentsia et avec un rigorisme digne d'un Emmanuel Kant? Un poète, un intellectuel ne sortant de sa caverne que pour annoncer un message, lanceur d'alerte.
Certes avec la mort clinique de Mohamed Yehdhih ould Breidleid, nous mortels auront plus droit aux tournures idiomatiques, aux litotes trempées ou autres expressions dérisoires.Mais les morts ne sont pas morts disait Birago Diop, n'est-ce pas le mythe prométhéen de l'homme à la mesure de toute chose. ?Même après sa mort. Repose en paix grand frère, moi qui t'ai connu qu'à travers tes écritures,je prie Allah de t'accorder une place au paradis. Amen
Ely ould krombele, Nouakchott Mauritanie