PROFIL DE CAS : Violation de notre espace aérien/L’Avion de la honte. | L'Information

PROFIL DE CAS : Violation de notre espace aérien/L’Avion de la honte.

lun, 01/17/2022 - 14:47

Mercredi 13 octobre 2021. C’est  la « débandade »,  même une véritable « débâcle » dans toutes les rédactions des journaux en lignes et sur les sites d’informations. La nouvelle est relayée et éparpillée comme une trainée de poudre : « Un avion s’est écrasé les premières heures de la matinée de cette matinée du 13 octobre  aux environs de la localité de BEDR, à quelques 70 kilomètres au Nord de Rosso près de de Keur Mécène ». Cette  information a même été  reprise par les rédactions de la presse nationale les plus crédibles.

Mauriweb, journal  en ligne qui  reprenait un autre journal,  Tawary, écrivait  dans un article publié le 13 octobre : « un avion non identifié s’est écrasé ce mercredi 13 octobre 2021 aux  premières heures de la matinée aux environs de la localité de BEDR ».

Et,  le journal en ligne Tiguint.info qui, le premier  avait lancé l’alerte et qui était à l’origine de la  propagation de l’information avait écrit : « Une brigade logistique des Forces Armées s’est rendue sur les lieux et une enquête a été diligentée pour  connaitre l’identité  de l’avion et  sa provenance ».

Selon même d’autres informations,  « Une brigade de gendarmerie avait  été dépêchée sur les lieux pour intensifier des recherches ».

L’information à la « Une » de toute la presse, avait fait réagir les pouvoirs publics. Comme pour rassurer l’opinion pubique,  l’Etat-major Général des Armées du pays avait  très tôt d’ailleurs,   publié un communiqué officiel  pour dire :  « que tous les avions de la flotte aérienne  des forces armées sont « stationnés »  et que l’appareil n’est pas militaire ». Un communiqué qui apportait  presque un « démenti », comme pour donner « peu de crédit » à l’information qui avait fait « La Une »  de tous les journaux et fait   du bouche à oreille des mauritaniens de la rue rodés dans ce genre de lpropagation de toutes  rumeurs  vraies ou fausses par  des « informations   à sensations » commentées à bord des taxis et des bus.

Avion fantôme ou avion furtif ?

Pourtant,  cette matinée de la journée du 13 octobre 2021, un avion est bel et bien passé à très basse altitude, -c’est-à-dire  à rase-motte-,  à la verticale de la petite localité de BEDR,  frôlant presque les cimes des arbres. L’information n’est donc  pas déniée de tout fondement. De nombreux témoins  oculaires, avaient bien  affirmés que le petit avion (type Cesena) est passé à la verticale de la petite localité de BADR  laissant échapper une colonne  de fumée noire.

A  cause de la persistance  de l’information,  des recherches avaient été finalement effectuées par l’armée et la gendarmerie pour  ratisser la zone. Les recherches effectuées aux environs de la petite localité de BEDR n’avaient rien données.

Où donc est passé cet aéronef qui volait à  basse altitude, laissant échapper  une colonne de fumée noire ?

En voyant une  colonne de fumée noire s’échapper de l’avion qui volait à très basse altitude, les bédouins avaient conclus à un crash. Pourtant  toutes les recherches et tous  les ratissages  effectués par les différents éléments des corps constitués  envoyés sur les lieux n’avaient rien donnés.

On est en droit donc de se poser quelques questions : « s’agissait-il bien d’un aéronef ou étions nous en face d’un phénomène de cas d’hallucination collective de tous les habitants de la localité de BEDR et de ses environs ? »

S’il s’agissait bien d’un aéronef. « Où était-il passé,  s’il ne s’était pas écrasé ? Et s’il s’était écrasé comme le pensaient les bédouins. Où sont « passés » les débris de l’appareil ?

« Si l’avion ne s’est pas écrasé,  qu’est ce qui explique cette colonne de fumée qui s’échappait de lui ?

Et enfin s’il s’agissait bien  d’un aéronef, quel était ce type d’aéronef, pourquoi volait-il  à si basse altitude, d’où provenait-il et où se dirigeait-il ?

Trois mois et quelques jours après cette incroyable affaire rocambolesque d’un avion qui se « serait écrasé » dans un triangle « Tiguint-Badr-Keur Mécène »,  pas de réponses ni officielles ni officieuses  sur ces questions qui restent et resteront d’actualité tant que des explications ne sont  pas fournies. A moins qu’un nouveau triangle des Bermudes se soit « créé » dans la poche « Tiguint-Badr-Keur Mécène » rien que pour  aspirer l’aéronef qui l’avait survolé.

L’Avion de « BEDR » un tissu de mensonge des bédouins relayés par  des journaux à sensation ?

Ce que les bédouins n’ont pas vraiment comprit, c’est la raison pour laquelle le petit avion qu’ils prenaient au début pour un avion de reconnaissance militaire,  volait très bas et laissait échapper une colonne de fumée.

Pour répondre à ces questions, on n’a pas besoin d’être un expert en navigation aérienne pour comprendre.  Quand un avion vole à très basse altitude,  généralement c’est pour l’une des deux raisons suivantes.

La première,  c’est parce que, soit  l’avion veut échapper  au balayage radar des contrôles aériens. Parce que si un avion vole à très basse altitude, il évolue dans ce qu’on appelle « l’angle mort du radar ». Cette zone qui échappe au balayage « spectral »  de la surface contrôlée  par le radar permet donc à l’aéronef de se déplacer sans être repéré par les contrôles aériens.

La seconde raison est  peut-être parce que l’appareil fait ce que l’on appelle un vol de reconnaissance. Mais si l’altitude est aussi basse comme la décrivent les bédouins, cela signifie que l’Avion fait plutôt ce qu’on peut appeler un « vol de repérage ».

Le « vol de repérage » à très  basse, est  un vol à risque élevé. Rarement effectué, il n’est pratiqué que par des pilotes acrobates ou  qui ont des aptitudes professionnelles pour  voler à rase-motte. C’est le cas des pilotes des canadairs (avions pompiers), ou des avions de lutte antiacridienne. Dans le  cas de l’avion de BEDR, le pilote volait peut être en coupant parfois les moteurs pour éviter les bruits et pour se déplacer par énergie synetique. Lorsque le pilote rallume les moteurs,  la poussée de propulsion  provoque un  lâcher de  fumée  épaisse qui se dégage  donnant l’impression qu’il est en feu  alors qu’en fait,  il ne fait que reprendre de la puissance de progression.

Mais généralement, dans les deux cas un  avion, pour échapper au contrôle arien  éteint son transpondeur,  un  appareil situé à l’avant de l’aéronef qui émet un signal radio conventionnel personnalisé    qui permet aux aiguilleurs du ciel d’avoir des informations sur son identité, son immatriculation et certaines données techniques sur son vol.

Mais d’où donc vient cet appareil ? Là est une question qui doit se poser avant   celle de savoir où il va ?

Il est  impensable que l’aéronef  vu au-dessus de BADR  soit venu  du Sénégal. Le Sénégal est un pays qui dispose d’une armée professionnelle, très bien équipé, très bien armée  et très regardante sur la souveraineté de son territoire.

La preuve. Peu de temps auparavant, un petit avion marocain avait survolé le territoire sénégalais. La réaction de l’Armée de l’Air sénégalaise ne s’était pas fait attendre. La chasse  aérienne sénégalaise avait intercepté l’avion « indésirable », immatriculé au Maroc qu’elle considérait  comme un avion espion. L’affaire avait suscité à l’époque l’embarras dans les milieux diplomatiques aussi bien  à Rabat qu’à Dakar. C’était en avril 2021. L’avion « espion » avait pour mission d’effectuer  des prises de vues et des « relevés topographiques » en Guinée Bissau. Mais semble-il,  il s’était « aventuré »  à l’intérieur du territoire sénégalais. Allez savoir pourquoi ?

Donc il y’a peu de probabilité que l’avion soit venu du Sénégal, encore que les bédouins, -tous musulmans,  qui connaissent donc bien les quatre coins cardinaux-, unanimement avaient tous déclaré que l’avion venait précisément  du nord.

Si l’Avion venait  donc du Nord, dans le sens d’une trajectoire  Nouakchott, Tiguint, cela veut dire ; que soit,  il est passé inaperçu  par les radars normalement nombreux déployés, certains à l’aéroport Oumoutoinsy  et d’autres sur certaines vedettes de surveillance de  nos côtes appartenant à la Marine nationale, soit alors,  -ce qui est à craindre-, il a été -« -laisser passer » volontairement ce qui peut pousser à la curiosité de savoir par qui et  pourquoi ?

Ce qui est certain, c’est que ni les « bédouins » des localités de BEDR, ni  ceux des environs de Ouad Naga qui eux aussi auraient  vus l’avion « fantôme »  survoler leur  zone à basse altitude, n’étaient pas pris d’une « hallucination collective ».

Reste à savoir comment se fait-il, qu’entre 8 heures 30  du matin, ce 13 octobre (heure à laquelle le petit appareil  a été aperçu  au-dessus des cimes des arbres aux environs de BEDR), et,  13 heures (heure locale) où il aurait été aperçu une  seconde fois volant à basse altitude à la verticale de Ouad Naga,  cet appareil qui se baladait librement  sans avoir été inquiété  ait « échappé » à l’interception d’avion militaire de notre pays qui dispose d’une flotte aérienne de chasse,  l’une des plus performantes de la sous-région?

Et, qu’est ce qui peut expliquer,  qu’aucun avion militaire de reconnaissance n’ait  décollé avec pour mission de localiser l’appareil vu par les villageois  survolant notre espace aérien illégalement ?

Maintenant,  si l’avion comme on l’avait dit,  volait à très basse altitude, il ne peut y avoir que deux explications. Soit, il faisait de la reconnaissance, soit il faisait du repérage. Et il est plus plausible que ce soit pour la seconde raison. Donc probablement  pour un  « repérage » soit d’un lieu où il voulait se poser pour débarquer ou récupérer quelque chose, soit pour « identifier »  un lieu qui pourrait servir de lieu d’atterrissage pour une opération qui suivrait.

Reprise d’activités  des cartels dans la sous-région ?

Ce  qui n’est peut-être pas exclu malheureusement si nos souvenirs nous remontent plus loin dans le temps. Depuis 2006, des opérations Kamikazes de vols et de transbordements  de la drogue dans la zone du littoral comprise entre Nouadhibou en Mauritanie et Freetown  en sierra Léone se  sont multipliées avec pour centre de gravité  Bissau. C’est  qu’on appelle maintenant dans les milieux de la lutte antidrogue,  «  l’Aéropostale ». C’est-à-dire la St. Exupéry de la Cocaïne.

Chez nous,  la gravité du drame s’est révélée dans la nuit du 1er au 2 mai 2007. Cette nuit-là, un Cesena  441 de type Conquest  s’était posé en catastrophe  sur la piste humide de l’aéroport international de Nouadhibou.  A son bord 629 kilos 150 g de Cocaïne. L’avion venait du Venezuela et  avait effectué un parcours  non-stop entre Recif au Brésil et Nouadhibou,  soit 4.800 kilomètres avec à son bord la « précieuse » cargaison. C’est le petit avion qui avait été retrouvé huit jours plus tard à 125 kilomètres aux environs de Tasiast et qui sert  actuellement  pour des missions militaires.

Les enquêteurs du  narcotrafic qui enquêtaient sur l’avion de Nouadhibou étaient  arrivés à la conclusion  que le petit Cesena, avait les mêmes caractéristiques qu’un autre appareil de même type qui, en 2006 s’était posé en Sierra Léone bourré de drogue. A son bord, il y’avait Georges Aritsizabal  Archilla, un nom très connu dans les milieux du Cartel qui opère des deux  côtés de l’Atlantique.

Moins de deux ans après Nouadhibou, un  Boeing 727 avait été retrouvé le 2 novembre 2009 à Tarkint dans la région de Bourem  à 200 kilomètre au Nord de Gao. Cet avion avait fait un vol « sacrifice» pour décharger une cargaison de cocaïne en plein désert au Mali. Sacrifice puisque l’avion avait été abandonné sur place après avoir accompli sa mission.

Ce Boeing loué au Venezuela, était immatriculé en Arabie Saoudite et volait sous licence Bissau Guinéenne expirée.

A l’époque le gouvernement malien avait refusé catégoriquement de partager ses informations avec l’Agence Onusienne de lutte contre la Drogue  et le Crime.

Plus récemment,  le mardi 30 novembre 2021, 47 jours après le survol de l’avion fantôme de la zone sud du Trarza,  au Maroc,  dans la matinée un petit  avion  avait effectué un atterrissage  d’urgence sur une route reliant Sebt Zinatt et Dar Chaoui  dans la région de Tanger. L’avion  était piloté par un espagnol et  tentait de faire passer une quantité important de drogue vers l’Espagne. Mais au moment du décollage,  à cause du brouillard des premières heures de la matinée, il avait fini sa course dans un camion de poubelle sur une piste peu fréquentée.

Avion aux couleurs blanches. Avion militaire. Hélicoptère. Avion volant non identifié mais avion quand même.

Chez nous, ce Mercredi  13 octobre 2021, tout au long de la journée, les mauritaniens n’ont parlé que de cet avion. Tantôt attribué à l’Armée Nationale, tantôt annoncé comme écrasé. Mais ce qui est    bizarre c’est que cette affaire de l’appareil que beaucoup de nos citoyens ont vus, à des moments différents et à des endroits différents a été classée sans suite. Pourquoi ? Mieux vaut de ne pas donner une réponse par  prudence. Mais si on ne donne pas de réponse,  cela veut dire simplement que nous allons accepter d’admettre que les villageois sont des menteurs. Que les journalistes sont des menteurs. Que peut être les villageois avaient trop bus ce jour-là,  ou que   les journalistes étaient tous drogués et les rédactions prises de folie.

Les autorités nationales sont presque arrivées à cette conclusion. En tous cas, au cours de la conférence de presse qui avait suivi  un conseil de ministres (à laquelle j’avais assisté), le porte-parole du gouvernement répondant  à la question d’un journaliste  avait dit : « les villageois avaient laissés entendre que l’avion était un avion de l’armée nationale. L’Etat-major  général des Armées a publié un communiqué disant qu’aucun appareil de l’Armée nationale n’avait décollé ce jour-là ».

Le  Ministre se voulait rassurant par cette réponse qui était pourtant tout le contraire. Ce que le ministre ne savait pas, c’est que l’important pour nous n’était pas de savoir si tous les appareils militaires étaient « cloués » au sol ce jour-là  ou si l’un deux était en vol de reconnaissance.

Ce qui était plutôt pour nous important de savoir c’est  pourquoi, aucun de ces appareils militaires n’avait décollé pour  vérifier les informations qui circulaient. L’annonce du survol  de notre territoire par un avion non identifié qui volait à très basse altitude   a été faite tôt dans la matinée, aux environs de 8 heures 30. A 13 heures l’avion, le même,  aurait été vu à la verticale de Ouad Naga selon d’autres témoins.

Ce n’était donc pas un cas d’« hallucination collective ». C’était bien un fait réel. Peut-être que les villageois sont des menteurs, peut être aussi que nous autres journalistes sommes des « rapporteurs » d’informations  « infondées ». Mais en tous cas, ce qui est par contre certain, c’est que l’armée Nationale manque de « réaction rapide ». C’est pourquoi, le temps que les gendarmes reçoivent l’ordre de faire mouvement sur les lieux, le temps qu’ils préparent  leurs véhicules et le temps de chercher  « mètre-par mètre » et par ratissage, l’avion fantôme avait peut être accompli sa mission.

Laquelle ? On ne saura peut-être  jamais. C’est ce qui explique peut-être pourquoi, deux mois et 12 jours après « ce disfonctionnement » grave dans la chaine de commandement de l’Etat-major des Armées,  le chef de l’Etat avait décidé  un « chambardement » au sein de la grande muette.

Le Général  Hamadi Ould Ely Mahmoud,  avait été appelé à la tête de l’État-major de l’Armée de l’Air. Il  sera certainement  plus regardant sur les « AVNI », ces Avions Volants Non Identifiés qui prennent notre espace aérien pour un lieu de « voltiges » aériennes. Espérons-le.

Mohamed Chighali

Journaliste indépendant