FICTION : AFFAIRE OULD ABDEL AZIZ/Le Procès du Siècle (3). | L'Information

FICTION : AFFAIRE OULD ABDEL AZIZ/Le Procès du Siècle (3).

sam, 07/16/2022 - 22:12

Note de l’auteur : Cette série, pure fiction,   anticipe sur des événements qui pourraient avoir lieu suite à l’Affaire de Ould Abdel Aziz,  communément appelée  « De la décennie ». Certains propos tenus,  sont ceux  d’avocats dont les noms n’ont pas été changés. Mais en général, tous les  propos  contenus dans les interventions des avocats expliquent  au grand public des détails importants pour mieux comprendre certains aspects juridiques du débat que pourrait susciter l’ouverture du  procès.  L’auteur que je suis, cherche par  la publication de cette série à aider les mauritaniens à mieux  comprendre les enjeux d’une bataille juridique que pourrait déclencher  le renvoi de cette affaire devant une juridiction.

 

COMPARUTION DU PREVENU  N° 1 (OULD ABDEL AZIZ).

TROIXIEME PARTIE 

 

 

Le Président du Tribunal :

 

« Assis! La séance est ouverte. Faites venir le prévenu Mohamed  à la Barre.  Nous reprenons donc le cours de cette audience. Je rappelle que l’introduction d’un téléphone dans la salle d’audience est interdite. Tout usage de téléphone au cours de l’audience expose son auteur à des possibilités de poursuites. Ceux qui souhaitent garder leurs téléphones sur eux doivent les éteindre dans la salle tout au long du procès.

 

Me Sandrela levez-vous. Je vous demande de déclarer publiquement que vous retirez les propos tenus à l’endroit des députés et de  présenter  toutes vos excuses au peuple mauritanien ! »

 

Maitre Sandra :

 

« Je présente toutes mes excuses au peuple mauritanien, peuple chaleureux et très hospitalier ainsi qu’à son Auguste Assemblée Nationale pour les propos déplacés tenus que je retire. J’ai été poussée à tenir de telles propos par des éléments détenus par mon client qui peuvent aider  notre collectif à  justifier de  l’incompétence de certains membres de la Commission d’Enquête Parlementaire au regard de relations « imprégnées » de rancunes qu’ils entretenaient à l’endroit de notre client.

Je renouvelle mes excuses au peuple mauritanien tout en me réservant le droit, de faire recours au moment opportun et si nécessaire à ces éléments pour apporter la preuve que le but de toute cette  manœuvre est évidemment d’empêcher mon client d’user de ses droits civiques les plus élémentaires, notamment son droit d’exercer des activités politiques. Je souhaite que ce que je viens de dire soit consigné dans la minute du procès. »

 

Le Président du Tribunal :

 

« Excuses acceptées. Cette déclaration sera cosignée comme vous le souhaitez. Asseyezvous. Je demande maintenant  à Me  Lô Gourmo de se lever.

 

Maitre Gourmo. Je vous demande de retirer les propos agressifs que vous avez tenus à l’endroit de Maitre Ould Ichidou et de lui présenter vos excuses. Je vous conseille dorénavant de contrôler les propos que vous tenez à l’endroit de vos confrères. Ici, nous sommes en audience dans un Palais de Justice. Nous ne sommes pas en réunion  syndicale   ou politique dans un Palais de Congrès. Cette remarque s’adresse également à vous  Maitre Ebety.»

 

 

Maitre Lô Gourmo :

 

« Je retire les propos tenus à l’endroit de Me Ould Ichidou, un confrère que je respecte et j’admire pour ses compétences malgré tout. Mais je lui conseillerais, en confrère, de s’assurer avant de les encaisser, que ses émoluments ne seront pas payés sur l’argent mal acquit. Notre collectif d’avocats de la partie civile se bat pour  la restitution au peuple de tous les biens mal acquis par l’accusé. »

 

Maitre Ould Ichidou. (S’adressant à Me Gourmo)

 

« Mon cher confrère, tes propos ne sont pas plus méchants ou dérangeants que d’autres que j’entends tous les jours. Je comprends que  nous sommes sur un champ de bataille judicaire où tous les coups même les plus bas sont permis. Nous devons savoir les uns et les autres encaisser. Ce sont de bonnes guerres de défenses. Quoiqu’il en soit tes excuses sont acceptées »

 

Le Président du Tribunal :

 

« Maitre Ichidou,   vous n’avez pas la parole. N’intervenez que  lorsqu’on vous le demande. Le débat sur cette question est maintenant clos. Nous reprenons le cours normal de cette audience. Maintenant je  m’adresse à vous Mohamed, l’accusé. Vous avez dit tout à l’heure (en réaction à ce qu’a dit Sandrela) : «  elle ne retire rien ! Les députés auxquels elle fait allusion sont tous  des corrompus, vous le savez bien ».

 

Mohamed, comprenez-le une bonne fois pour toutes et dans votre intérêt. Vous êtes un inculpé  qui se tient  en ce moment à la barre de la salle d’audience d’un tribunal qui le  juge. Je vous demande, une fois encore de retirer les propos  que vous avez tenus à l’égard des honorables élus de l’Auguste Assemblée Nationale de la République Islamique  de Mauritanie. »

 

Ould Abdel Aziz :

 

« Je ne retire rien. Ils sont corrompus, vous le savez bien. Effectivement,  je me tiens à la barre d’un tribunal, mais ce tribunal est incompétent pour me juger. Oui je suis à la barre, je suis détenu, je suis inculpé, mais tout cela,  je le suis  par des manœuvres de procédures  dilatoires qui n’ont pour seul objectif que de faire croire à certains naïfs  que je suis auteur de crimes et délits.

Je ne suis pas à cette barre pour me faire juger, parce que je ne me laisserais pas juger par un tribunal incompétent au vu de l’article 93 de la Constitution qui me confère une immunité. J’ai accepté d’être  là, à cette barre pour vous rappeler vous, président de ce tribunal,  que vous avez en face de vous  un homme, un détenu, appelez –le comme vous voulez,  que vous n’êtes pas habilité à juger. Maintenant, par rapport à ce que j’ai dit à l’endroit de « vos » honorables députés, Je ne retire rien de ce que j’ai dit. Ils sont tous corrompus, vous le savez bien.»

 

Le Président du Tribunal :

 

« Mohamed, ce n’est pas ce que je sais moi qui intéresse ce tribunal. Ce qui intéresse ce tribunal, c’est ce  que vous savezvous, de ce que « vous savez bien » et ce pour lequel vous êtes jugé en ce moment.

 

Je vous conseille de ne pas perdre beaucoup de temps  sur l’évaluation de la compétence du tribunal habileté à vous juger. Ce n’est pas vous, accusé  qui jugez de la compétence du tribunal auquel vous devez faire face et ce n’est pas vous qui choisissez ce tribunal à votre convenance ou à votre goût.

 

Mohamed « ili ghalikli », en ce moment, au moment où je vous parle, vous devez répondre des faits qui vous accusent d’enrichissements  illicites, de blanchiment d’argent, de  corruption, de dilapidations des biens publics et d’octrois d’avantages indus à des tierces personnes, qui sont le plus souvent vos proches.

 

Depuis le début de ce procès, en  plus, -(ce qui ne vous facilite pas les choses à vous  et ne facile pas les choses au tribunal non plus)-, vous n’arrêtez pas de vous faufiler entre les questions pour éviter de répondre à celles-ci. Et vous le faites parce que simplement  vous savez très  bien qu’il vous est difficile de répondre à ces questions. Pas parce que  vous n’avez pas les réponses, mais parce que vos réponses risquent de faire retenir contre-vous des actes commis qui sont réprimés par les articles 53,54,164,165,169,379 du code pénal ainsi que par les articles 02,36,37,38 de la loi régissant le blanchiment d’argent pour lequel vous avez mis en place des mécanismes qui reposent sur des activités illicites d’une Fondation créée pour votre fils, et dont vous assurez vous-même en personne le fonctionnement depuis son décès..

 

Moi, je vous conseillerais, dans votre intérêt,  d’arrêter cette comédie et de collaborer avec la justice, parce que d’abord vous êtes justiciable. Et parce qu’ensuite, votre comportement ne vous mène à rien et ne fait que compliquer pour vous les choses déjà trop compliquées.

 

Ce tribunal qui vous juge, doit vous juger sur des faits. Les procès-verbaux des enquêtes de la police judicaire et ceux  du Pôle des juges d’instructions vous accusent par des preuves,  d’actes contraires à la loi  commis dans l’exercice de vos fonctions entre 2009 et 2019.

 

Jusqu’à cet instant  où je m’adresse à vous,  vous êtes innocent au vu de la loi, en tous cas tant que votre culpabilité n’est pas établie. Et pour que cette culpabilité ne soit pas établie, cela est évident, il faut bien que vous apportez les preuves de votre innocence.

 

Vous  avez dit au cours de la première audience que vous ne reconnaissez, ni les faits qui vous sont reprochés, ni ce tribunal qui vous le reproche, prétextant que ce tribunal n’est pas habileté à vous juger. Il faut que vous vous rendiez à l’évidence. Le parquet général a orienté votre dossier à ce tribunal chargé de vous juger. Et vous êtes jugé en ce moment.

 

Mohamed, Je vous repose encore une fois  la question : « Est-ce que vous reconnaissez les faits qui vous sont reprochés ? »

 

Maitre Lô Gourmo : (Qui demande la parole)

 

« Monsieur le Président s’il vous plait,  juste une suggestion avant que l’accusé ne réponde à votre question.»

 

Le Président du Tribunal :

 

« Allezy Maitre Lô Gourmo. Rapidement s’il vous plait »

 

Maitre Lô Gourmo :

 

« Le collectif de la défense de la Partie civile, souhaite que le prévenu soit interrogé sous serment. »

 

Le Président du Tribunal :

 

« Je peux savoir pourquoi vous voulez qu’il soit interrogé sous serment ? »

 

Maitre Ebety : (qui demande la parole).

 

« Merci Monsieur le Président. Je demande à Maitre Gourmo de retirer sa proposition ! »

 

Maitre Lô Gourmo :

 

« Et pourquoi donc Maitre,  vous voulez que je retire cette proposition ? Je ne comprends pas ! » 

 

Maitre Ebety :

 

« Il n’y a rien  à comprendre.  Deux fois cet homme à la barre avait prêté serment même  en jurant par « Allah le tout puissant et sur le livre Saint, d’assurer entièrement et pleinement ses fonctions  de président avec dévouement et de respecter les dispositions de la Constitution et des lois de la République Islamique de Mauritanie et de veiller à préserver l’indépendance du pays, sa souveraineté et son intégrité territoriale ».

 

Et  en plus, toujours en prêtant serment, sur le livre Saint, il avait même juré au nom d’Allah,  le Tout Puissant qu’il ne prendrait et qu’il ne soutiendrait aucune initiative de manière directe ou indirecte qui soit de nature à réviser les dispositions constitutionnelles, portant sur le mandat du président de la république et sur les conditions de son renouvellement prévus par les articles 26 et 28 de la Constitution.

 

Dix ans durant,  cet homme que  vous voyez-là à la barre et qui ne cesse de crier  à la victime, n’a fait que tout  le contraire de ce qu’il avait promis de faire  en  jurant sur le Saint Coran. Cet homme ne tient des engagements  que quand il a intérêt ou  pour s’enrichir illicitement. Je peux même dire que depuis 2014, il avait  prêté « allégeance » au Satan en faisant tout ce qui est contraire aux valeurs morales, religieuses et sociales.

 

Et maintenant,  il se tient à cette barre, pour nous faire la morale, en essayant de semer les troubles dans nos esprits pour dire que ce tribunal n’est pas habileté à le juger. Ce tribunal est compétent pour juger aussi bien le petit voleur des bas quartiers qui subtilise un bouteille de gaz, que lui aussi,  ancien président  qui avait durant  ses deux  mandats  transformé  son bureau du Palais de la République  en  agence familiale  de négoce, de courtage et de transactions immobilières, d’import-Export, de trafics de devises et d’influences de toutes sortes. »

 

Maitre Taleb Khyar :

 

« Objection Monsieur le président ! Ce sont là de très  graves accusations infondées »

 

Le Président du Tribunal :

 

« Objection rejetée !»

 

Maitre  Sandrela :

 

« Objection Monsieur le président ! On le sent. Maitre Ebety est une caisse de résonnance politique.»

 

Le Président du Tribunal :

 

« Objection rejetée ! Maitre Sandrela. Un peu de retenue s’il vous plait. »

 

Maitre Ould Ichidou :

 

« Objection Monsieur le président ! Si Maitre Ebety  affirme que notre client avait  transformé  son bureau du Palais de la République  en  agence familiale  de négoce, de courtage et de transactions immobilières, d’import-Export, de trafics de devises et d’influences de toutes sortes, il ne doit pas oublier d’ajouter que ce bureau qu’il connait bien,  servait aussi de guichet de retrait pour ceux qui crient maintenant au voleur ! . »

 

Le Président du Tribunal :

 

« Objection rejetée ! Maitre Ichidou, vous avez promis d’enterrer la hache de guerre. Vous l’avez oublié ? »

 

Maitre Ould Ichidou :

 

« C’était lui qui avait promis d’enterrer cette hache. Apparemment il n’a pas changé de caractère. Il ne peut pas tenir ses promesses ce qu’on savait déjà de lui  depuis les années 80.»

 

Le Ministère Public :

 

« Objection Monsieur le président ! »

 

Le Président du Tribunal :

 

« Objection rejetée !»

 

 

Maitre Ethmane : (nom d’emprunt/Collectif de la Défense de Aziz)

 

« Objection Monsieur le président ! »

 

Le Président du Tribunal :

 

« Objection rejetée ! »

 

(Brouhaha dans la salle)

 

Le Président du Tribunal : (qui tape du marteau sur la table)

 

« Silence ou je fais évacuer la salle. »

 

Ould Abdel Aziz :

 

« Ould Ebety, tôt ou tard, je vous ferais avaler les propos que vous avez tenus ! »

 

Maitre Ebety :

 

« Vous me menacez ? »

 

Ould Abdel Aziz :

 

« Prenezle  comme vous voulez. Vous aurez de mes nouvelles tôt ou tard »

 

Le Président du Tribunal :

 

« Mohamed ! Taisezvous. Je vous somme de ne plus parler aux avocats directement si ce n’est pour répondre à leurs questions s’ils sont autorisés à les poser.»

 

Maitre  Sandrela :

 

«  C’est une offense à la personne de notre client qui s’écarte du débat sur le fond de l’accusation. Maitre Ebety doit assumer les conséquences de ces diffamations ! »

 

Le Président du Tribunal :

 

« Maitre Sandrela, Je ne vous ai pas autorisée à intervenir. La prochaine fois que vous faites de telles répliques impromptues  je vous fais expulser de la salle. 

Maintenant je m’adresse à vous Maitre Ebety. Je vous demande de vous lever. Maitre Ebety,  je vous ordonne  de retirer immédiatement tout ce que vous venez de dire à l’endroit de l’accusé Mohamed et de lui présenter à lui ainsi qu’à sa défense vos excuses. »

 

Maitre Ebety :

 

« Monsieur le Président si nous devons retirer à chaque fois toutes les vérités qui se disent ici, il sera difficile de juger de cette affaire. Ce que j’ai dit aide à comprendre mieux qui est cet individu que juge  ce tribunal. Ce Monsieur  avait été élu pour combattre la gabegie et le détournement des deniers publics. Mais au lieu de le faire,  il avait simplement  écarté tous ceux qui soit disant selon lui, pillaient les ressources pour  mieux les piller luimême à son profit dans  un cercle fermé de ses proches. Plus grave encore il avait fait de notre pays une entreprise familiale gérée de manière tricéphale par un groupe restreint au palais»  

 

Le Président du Tribunal :

 

« Maitre Ebety, je ne vous demande pas de commenter. Je ne vous demande pas non plus  de dresser un  profil de l’accusé. Je vous demande de vous conformer aux règles de bienfaisances visà-vis et de l’accusé et de ses conseils en retirant simplement  tout ce que vous avez dit à l’endroit de l’inculpé et en  présentant  vos excuses à son collectif de défense,  sinon je me verrais dans l’obligation de vous expulser de cette  salle avec une  interdiction irrévocable de votre retour aux plaidoiries. »

 

Maitre Lô Gourmo : (chuchote dans l’oreille de Maitre Ebety).

 

« Ecoutez Maitre Ebety. Ce n’est  vraiment pas le moment pour une confrontation avec le président. Retires  ce que tu as dit et présente tes excuses au collectif de la défense s’il te plait. Ce président est capable de te renvoyer de cette salle et nous avons besoin de toi à nos côtés pour coordonner notre travail. Fais ce qu’il te demande et qu’on en finisse.»

 

Le Président du Tribunal : (qui tape sur la table)

 

« Maitre Gourmo, vous recommencez à parler sans autorisation, et je vous expulse de cette salle. Maitre Ebety, nous n’avons pas que ça à faire. Décidezvous. Soit vous faites ce que je vous demande soit vous sortez de cette salle. »

 

Le Ministère Public :

 

« Monsieur le président s’il vous plait. J’ai une proposition à faire. »

 

 

Le Président du Tribunal : (qui tape sur la table)

 

« Le Ministère Public, gardez votre proposition pour un autre sujet de débat pas celuilà. Maitre Ebety, vous nous perdez le temps ! »

 

Maitre Ebety :

 

« Monsieur le Président  je retire ce que j’ai dit et je présente mes excuses à mes confrères de la défense de l’accusé. »

 

Ould Abdel Aziz :

 

« Par contre moi je ne retire pas ce que j’ai dit Ebety. Tôt ou tard je vous ferais  avaler ce que vous avez dit de moi. »

 

Maitre Sandra :

 

« Monsieur le président  s’il vous plait  permettezmoi de faire quelques mises au point. »

 

Le Président du Tribunal :

 

« Autorisation  accordée » Me Sandra vous avez la parole ! »

 

Maitre Sandra :

 

« Merci Monsieur le président ! Je voudrais faire remarquer que ce tribunal ne juge pas n’importe qui. Il juge un ancien chef de l’Etat qui a servi la nation pendant plus de onze ans. Même si  on ne juge pas cet homme pour  sa qualité d’ancien chef d’état, mais plutôt comme une personne en conflit avec la loi, ce qu’il faut prouver par des batailles judicaires et  des preuves irréfutables mais pas par des dénigrements, il n’en demeure pas moins que cet homme, qui a présidé aux destinées de ce pays pendant dix ans, reste un grand symbole. 

 

Certains de mes confrères de la Partie civile ne  posent de  regard sur la personne de mon client  que comme étant un homme en conflit politique avec son successeur, l’actuel président. Ce n’est pas juste. Nous sommes en audience et  nous devons dire le droit. Et pour dire ce droit, il faut que nos arguments reposent seulement et uniquement sur des faits et des preuves.

 

Durant ses deux mandats, cet homme qui se tient à la barre a fait pour son pays, ce que tous les autres présidents réunis même y compris l’actuel président n’ont pas faits cumulativement. Les avocats de la partie civile doivent se souvenir qu’ils sont avant tout  des citoyens de ce pays et de ce fait, ils  ne doivent pas oublier que cet homme a présidé aux destinées de ce pays ce qui lui donne de facto un respect qui doit éviter aux uns et aux autres de verser dans des impolitesses qui ne font qu’envenimer une atmosphère déjà  très tendue. C’est pourquoi, je demande à nos  confrères d’en face,  de mettre de l’eau dans  leur zrig, ne seraitce que par respect pour la personnalité d’un ancien Chef de l’Etat. »

 

Maitre Lô Gourmo :

 

« Monsieur le Président. Juste une petite remarque à faire à ma consœur Sandrela s’il vous plait.»

 

Le Président du Tribunal :

 

« Autorisation refusée. Maitre Lô on vous a assez entendu depuis le début de ce procès. Gardez vos remarques pour la suite de l’audience. Messieurs les avocats, nous n’avançons pas beaucoup à cause de vos petites querelles et de vos coups bas que je vous conseille de garder pour autre lieu et pour autre circonstance. Nous allons entrer dans le débat.

 

Monsieur Mohamed, Est-ce que vous connaissez Monsieur Yahya Ould Hademine, l’accusé N° 2 dans cette affaire ici dans le box des accusés ? ».

 

Ould Abdel Aziz :

 

« Je peux savoir pourquoi vous me posez cette question ? » 

 

Le Président du Tribunal :

 

« Mohamed, c’est la deuxième fois que je vous le répète. Je vous avais déjà dit que c’est moi qui pose les questions. Contentezvous de répondre. »

 

Ould Abdel Aziz :

 

« Je croyais le connaitre. Mais j’avoue honnêtement  qu’après le déclenchement de cette affaire, j’ai découvert dans les locaux de la police des crimes économiques et financiers  que cette personne dont vous venez de prononcer le nom et la personne qui travaillait  sous mon pouvoir n’étaient pas les mêmes  personnes.»

 

Le Président du Tribunal :

 

« Mohamed, expliquezvous. »

 

Ould Abdel Aziz :

 

« Pourquoi vous m’appelez toujours par Mohamed ? »

 

Le Président du Tribunal :

 

« Quelle question ! Parce que c’est votre prénom d’étatcivil. Par quoi vous voulez que je vous appelle par  l’inculpé, le prévenu, l’accusé ou comment ? »

 

 

Ould Abdel Aziz :

 

« Je ne sais pas, je n’étais pas habitué à entendre les gens m’appeler par mon prénom. »

 

Le Président du Tribunal :

 

« Vous voulez que je vous appelle par « Aziz » ce sobriquet qui vous a été collé par les sénégalais et assimilés ? »

 

Ould Abdel Aziz :

 

« C’est un « raccourci » par lequel m’appellent aussi les mauritaniens !  Il me va bien »

 

Le Président du Tribunal :

 

« Il vous va bien peut être ais ce n’est pas votre nom. Ici nous sommes dans un tribunal. Nous ne sommes pas dans un meeting populaire dans la cour de l’ancien aéroport que vous connaissez bien et au sujet duquel nous allons d’ailleurs parler plus tard ! » 

 

Ould Abdel Aziz :

 

« Si vous parlez de lui, n’oubliez pas de parler aussi du nouveau aéroport. Je vous avais posé la question c’était juste pour faire cette remarque. Vous êtes la première personne à m’appeler par mon prénom. Les autres m’appelaient par Mr le président. C’est un titre qui se conserve je croyais.»

 

Le Président du Tribunal :

 

« Et moi j’ai répondu à votre question  juste pour vous rappeler qu’ici nous sommes dans une salle d’audience pas dans un salon de Tevragh Zeina. Les autres vous appelaient « Président » par respect pour vous. Ici, on ne respecte que la vérité, rien que la vérité ou la force de loi. Et la vérité  et la force de loi font de vous un accusé  tout simplement. Vous retrouverez votre titre de « président » si vous êtes acquitté ce que je souhaite pour vous. En attendant, revenons à nos moutons comme dit le proverbe. Monsieur Mohamed, Estce que vous connaissez Monsieur  Yahya Ould Hademine, l’accusé N°2 dans ce dossier N°001/2021 ? ».

 

 

Ould Abdel Aziz :

 

« J’ai déjà répondu à cette question. Je  vous ai dit que je croyais le connaitre. Mais après le déclenchement de cette affaire, j’ai découvert,  dans les locaux de la Police des Crimes Economiques et Financiers  que cette personne dont vous venez  de prononcer  le nom et celle qui travaillait  sous mon pouvoir n’étaient pas les mêmes. »

 

Le Président du Tribunal :

 

« Laquelle de ces deux personnes travaillait pour vous. Celle que vous croyiez  connaitre, ou celle que vous avez découverte  dans les locaux de la Police des Crimes Economiques et Financiers  lors de la confrontation qui avait mal tourné ? » 

 

Ould Abdel Aziz :

 

« Aucune des deux n’a travaillé pour moi.  Ni celle qui, je croyais travaillais pour moi, ni celle qui travaillait pour la police ? »

 

Le Président du Tribunal :

 

« Ni celle qui travaillait pour la police vous  avez dit ?  C’està-dire ? Expliquezvous.»

 

Ould Abdel Aziz :

 

« Pourtant c’est clair ce que je viens de dire ! Ça ne demande pas d’explications. »

 

Le Président du Tribunal :

 

« C’est peutêtre clair pour vous mais pas forcément  pour moi. Vous pouvez m’expliquer ? »

 

Ould Abdel Aziz :

 

« C’està-dire cette personne dont vous avez prononcé le nom  qui a collaboré avec la Police. »

 

Le Président du Tribunal :

 

« Qu’estce que cela veut dire pour vous « collaborer avec la Police? » 

Ould Abdel Aziz :

 

« Dire à la Police ce qu’elle cherche à entendre ! »

 

Me Ould Ichidou :

 

« Objection Monsieur le président !  Votre honneur ! Vous cherchez  à  en venir à une  conclusion qui cache  votre intention réelle ! »

 

Le Président du Tribunal :

 

« Objection rejetée. Maitre Ichidou. Arrêtez s’il vous plait  de m’interrompre et surtout gardez vos insinuations pour vous. Prenezle comme un avertissement !»

 

Maitre Brahim : (Nom d’emprunt/Avocat de Yahya Ould Hademine)

 

« Objection Monsieur le président !  L’accusé en veut à mon client,  parce que mon client  a dit à la Police ce qu’il savait et tout ce qu’il savait sur ce que l’accusait luimême savait aussi,  mais qu’il refusait de reconnaitre ! »

 

 

Le Président du Tribunal :

 

« Maitre Brahim. Objection rejetée. Premier avertissement. N’intervenez plus avant qu’on vous le demande. On continue Mohamed. Pour vous don, quand Monsieur  Yahya Ould Hademine dit  à la Police ce qu’il sait et tout ce qu’il savait sur tout ce que vous,  vous aussi savez, mais que vous ne voulez  pas dire,   c’est une collaboration avec la Police  ou un témoignage utile à la justice pour trouver des réponses à certaines questions qui se posent pour une enquête ordonnée par la justice ? »

 

Ould Abdel Aziz :

 

« Je ne réponds pas à cette question ! »

 

Le Président du Tribunal :

 

« Je peux savoir pourquoi, vous ne voulez pas répondre à cette question ? »

 

Ould Abdel Aziz :

 

« Je dois me concerter avec mes avocats avant de répondre à cette question ! » 

 

 

 

 

Le Président du Tribunal :

 

« Vous ne pouvezpas vous concerter avec vos avocats quand vous êtes à la barre des accusés. Peut-on savoir pourquoi, vous ne voulez pas répondre à cette question ? »

 

Ould Abdel Aziz :

 

« Je ne réponds plus à vos questions. »

 

Le Président du Tribunal :

 

« Et je peux savoir pourquoi  vous avez pris cette décision de ne  plus répondre à mes questions. Vous voulez peut être un verre d’eau ? »

 

Ould Abdel Aziz :

 

« Non merci je n’ai pas soif. Si vous voulez que je réponde à vos questions, vous avez le choix entre deux alternatives. Soit, vous référez cette audience à une audience de la Haute Cour de justice, soit alors  vous invitez la presse nationale et internationale pour couvrir en direct cette audience ! En ce moment je dirais tout ce que vous voulez savoir et même ce que vous ne voulez pas savoir. »

 

Le Président du Tribunal :

 

« Parce que vous croyez que c’est vous, l’accusez qui établissez les règles du jeu ? Estce que vous avez pris vos médicaments ce matin ? »

 

Ould Abdel Aziz :

 

« Depuis quand la Justice se préoccupet-elle  de ma santé ? »

 

Maitre Sandra :

 

« Monsieur le Président. Le collectif de défense de l’accusé demande la suspension de l’audience pour concertation. »

 

Le Président du Tribunal :

 

« Proposition rejetée. Monsieur Mohamed, si vous voulezvous reposer un peu on peut suspendre la séance. »

 

Ould Abdel Aziz :

 

« Non. Je ne suis pas fatigué. J’ai pris mes médicaments et je suis en pleine forme « El Hamdoullilah ». Mieux encore,  je jouis de toutes mes facultés physiques et mentales et je peux tenir debout à cette barre jusqu’à demain à la même heure. Mais je ne réponds plus à vos questions. Posezvos questions à celui qu’il vous préoccupe de savoir,  si je le connais ou pas. Il a collaboré avec la Police, il peut bien aussi collaborer avec vous. Ce tribunal est habileté à le juger lui, pour les crimes et délits qu’il a commis, qu’il connait et que je connais. Donc appelezle à la barre, ce Beni oui-oui. Il a certainement encore beaucoup de mensonges à raconter. »

 

Le Président du Tribunal :

 

« Mais Mohamed ce que vous diteslà, vous le dites de celui qui a été pour vous un Premier Ministre très fidèle. »

 

 

 

Ould Abdel Aziz :

 

«  S’il y’a une  chose que je regrette et que,  peutêtre je regretterais  toute ma vie, c’est de l’avoir appelé à cette fonction. »

 

Le Président du Tribunal :

 

« Mais vous ne récompensez pas sa fidélité. Vous ne trouvezpas que c’est injuste ? »

 

Ould Abdel Aziz :

 

« La fidélité n’est pas un mot connu du lexique des mauritaniens. »

 

Le Président du Tribunal :

 

« Pourtant vous,  vous êtes restés douze ans très fidèle à vos principes ! »

 

Ould Abdel Aziz :

 

« De quels principes vous parlez ? »

 

Le Président du Tribunal :

 

« Vos principes d’instaurer  toutes formes de gabegie, de détournement des deniers publics, de blanchiment d’argent, de spéculations foncières, de montages financiers et économiques des quels vous tirez profits directement ou par personnes interposées, de trafic de devises et de corruptions avérées.»

 

Ould Abdel Aziz :

 

« C’est vous qui le dites. »

 

Le Président du Tribunal :

 

« Ce n’est pas moi  qui le dit. Ce sont les preuves que je tiens  entre les mains qui le disent. Des preuves qui pointent de fortes présomptions  de détournements de fonds sous différentes formes contenues dans le rapport de 900 pages de la Commission d’Enquête Parlementaire et des accusations graves contenues dans  le Procèsverbal de 500 pages de l’instruction  transmis par le parquet général le mercredi 1er juin dont votre collectif de défense détient une copie. C’est à vous de me convaincre du  contraire de ce dont vous accablent ces documents.»

 

Maitre Ould Ichidou :

 

« Objection ! Monsieur le président ce que vous avez entre les mains et que vous appelez preuves ne peuvent être considérées que si notre client est entendu sur les vrai ou le faux d’entre ces preuves, qui ne peuvent au stade actuel et  d’aucune manière  établir la culpabilité de notre client. »

 

Le Président du Tribunal :

 

« Objection acceptée. Maitre Ichidou.  Reste à votre client de donner sa version des faits. Ni la Police judiciaire en charge de l’enquête sur les crimes économiques et financiers dont est accusé votre client, ni le Pôle des juges en charge de l’instruction ne sont parvenus à le faire parler, ne seraitce que  pour lui permettre de se disculper. Si vous vous pouvezvous  faire voler en éclat  les accusations portées contre lui je veux bien. En attendant qu’il se décide à donner ses versions de faits, il reste pour moi et  au vu de ce tribunal  l’auteur présumé des crimes et délits desquels on l’accuse. Vous êtes bien d’accord avec moi. »

 

 

 

Maitre Sandrela :

 

« Nous avons les arguments et les preuves qui disculpent notre client.»

 

Le Président du Tribunal :

 

« Tant mieux. C’est ce qu’on attend de vous et de lui. De présenter ces preuves. »

 

Le ministère Public :

 

« Monsieur le président, le Ministère Public demande la suspension de l’audience pour concertation avec le Parquet Général. »

 

Le Président du Tribunal :

 

« Sur demande du Ministère public, l’audience sera suspendue. Mais avant,  je voudrais poser une dernière  question à l’accusé. Mohamed, j’ai constaté que vous avez toujours  évité à chaque fois de prononcer le nom de Monsieur Yahya Ould Hademine dans vos réponses à mes questions. Ce nom vous porte malheur maintenant ? »

 

Ould Abdel Aziz :

 

«  Il ne mérite même pas que j’évoque son nom. Et pourtant beaucoup de gens m’avaient prévenu. Que j’avais commis la plus grande erreur de ma vie en l’appelant à cette fonction. J’avais laissé emprisonner le Directeur Général de l’ENER, pour sauver sa peau, c’est un ingrat. Et il n’est pas le seul d’ailleurs. L’autre,  est ce ministre que j’avais ramassé dans la poubelle du garage administratif pour le faire entrer au gouvernement. Mais il me le payera. »

 

Le Président du Tribunal :

 

Donc, sur la  demande du Ministère public, l’audience est  suspendue. La séance est levée. Elle reprendra demain InchaAllah.»

 

( A suivre)

 

Mohamed Chighali

Journaliste indépendant