Le président de l’Union Nationale de l’Inter professions de l’Horticulture (UNIH) Moulaye Moulaye Idriss à propos de réalités et perspectives du secteur agricole en Mauritanie | L'Information

Le président de l’Union Nationale de l’Inter professions de l’Horticulture (UNIH) Moulaye Moulaye Idriss à propos de réalités et perspectives du secteur agricole en Mauritanie

sam, 05/18/2024 - 21:15

L’autosuffisance agricole est un objectif ambitieux pour tout le pays. La Mauritanie, avec ses vastes terres fertiles, ses ressources en eau souterraine et son capital humain, semble prête à relever ce défi.

 

La Mauritanie pourrait atteindre l’autosuffisance en produits maraichers dans un court terme, à condition que toutes les conditions nécessaires soient réunies, affirme le président de l’Union Nationale de l’Inter professions de l’Horticulture (UNIH) Moulaye Moulaye Idriss.

Il évoque ici des sujets intrinsèquement liés au secteur dont la dépendance agricole de la Mauritanie de l’extérieur, la nécessité pour réaliser l’autosuffisance nécessite de prendre un train de mesures d’accompagnement indispensables, la corrélation entre la flambée des prix et le marché international, les saisons favorables au maraichage dans le pays et son point de vue sur la décision du gouvernement de reprendre les taxations sur les produits importés

 

 

 

Dépendance agricole de l’extérieur

 

La politique agricole était orientée surtout sur la filière rizicole. C’est à partir de 2017, année de la fondation de notre UNIH, que nous avons lancé un grand programme de production maraîchère avec le département de l’agriculture, en ses structures centrales et décentralisées. Diverses actions ont été engagées. D’abord des mesures de protection pour encourager la production nationale avec la taxation des importations, puis l’acheminement de la production nationale vers les marchés, avec la mise en place de dispositions régionales de commercialisation pour réguler l’offre à la demande, surtout pendant les périodes de grandes récoltes (Janvier-Avril). Mais malgré toutes ces mesures, notre pays demeure encore tributaire des productions des pays voisins qui mènent des politiques de grande envergure pour conquérir les marchés extérieurs.

 

L’autosuffisance nécessite un train de mesures d’accompagnement indispensables

 

L’autosuffisance n’aura pas lieu tant que l’État ne prendra pas des mesures draconiennes pour toutes les productions agricoles confondues (maraîchère, rizicole, fruitière, et céréalière traditionnelle). Il ne s’agit pas seulement de la taxation. Il faut aller au-delà en bloquant les importations pendant les périodes de grande production. Ce qui est regrettable est que tous nos pays voisins, sans exception, appliquent ce type de protection contre nos produits.

 

Hausse des prix liée au marché international

 

 

L’augmentation des prix de certains légumes – pommes de terre et oignons – est liée au marché international. L’Inde et le Pakistan ont fait une mauvaise campagne l’année passée à cause des inondations. En ce qui concerne notre production, les prix sont stables (courge, aubergine, navet, piment…). Pour les tomates, carottes, poivrons et concombres, on attend des changements importants dans l’approvisionnement du marché, grâce aux producteurs nationaux de l’Aftoutt Essaheli et du Trarza. D’importantes quantités sont en passe d’être acheminées vers nos marchés à partir de ces zones et cela va contribuer à faire baisser notablement les prix.

 

 

A propos des saisons favorables au maraichage dans le pays

Certaines wilayas sont propices au maraîchage toute l’année, à cause de leur climat tempéré (Trarza, Nouakchott, Nouadhibou), d’autres le sont pour certains produits comme les courges, le gombo, le piment, l’aubergine, le navet, l’oseille de Guinée ou le manioc. La question cruciale est certainement celle d’adapter le blocage des importations en fonction de la capacité de notre production nationale à les remplacer. La réponse est que les États ne doivent pas jouer au chat et à la souris, c’est-à-dire attendre l’autosuffisance pour se protéger. Prenons le cas du riz : on n’a pas attendu celle-ci pour protéger la filière et l’on a pris la très courageuse décision d’évaluer nos besoins en riz à 14 000 tonnes par mois, autorisant en conséquence l’importation de 2000 tonnes par mois pour compléter les 12 000 tonnes produites en Mauritanie. Voilà comment sommes-nous arrivés à couvrir 80% de nos besoins, alors qu’on en atteignait à peine 30% auparavant. Malheureusement, certains importateurs traditionnels qui s’étaient transformés en distributeurs de riz national se sont mis à contester cette politique, en reprenant illégalement des importations de riz étranger avant de le distribuer via leurs réseaux dans l’Est et le centre du pays.

 

Point de vue sur la décision du gouvernement de reprendre les taxations sur les produits importés

 

 

C’est une décision encourageante. Elle répond à la demande de notre union formulée depuis plusieurs mois portant sur la reprise des taxes sur les légumes importés à hauteur de 40% de leur valeur. Elle portera des fruits si elle est effectivement mise en œuvre. Les 40% décidés par le gouvernement peuvent devenir 10 ou 15%, dans la pratique, à cause du jeu traditionnel des transitaires dans la fixation de la valeur réelle et leurs complicités avec les importateurs pour diminuer celle-ci devant la douane. Je pense que c’est une décision qui peut améliorer la situation mais on doit fixer un barème sûr, en fonction du type de camion (grand ou petit), avec coût fixe, comme avant la COVID (alors 30%, soit 900 000 MRO pour le grand camion et 600 000 pour le petit). Avec les 40 % fixés aujourd’hui, ce serait donc 1 200 000 MRO pour les gros camions et 800 000 pour les petits. Il faut aussi et surtout exécuter le projet d’équiper tous les points de passage à nos frontières, PK 50 de Nouadhibou, Rosso, Medbougou et celui côté algérien où la douane disposait de certains équipements, il y a deux ans, pour plus de transparence, avec les ponts basculés et serinés.

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A propos du président de l’Union Nationale de l’Inter professions de l’Horticulture (UNIH) Moulaye Moulaye Idriss

Ingénieur agronome, Moulaye Moulaye Idriss a passé l’essentiel de sa carrière dans l’administration publique de l’agriculture, en gravissant quasiment tous les postes de 1985 à 1997. Après avoir occupé, de 1992 à 1996, celui de conseiller économique chargé de la direction de planification où il pilota l’étude après barrage et le programme d’ajustement du secteur agricole, Il fonde et dirige alors la GSA jusqu’en 2003 où il se lance dans la production maraîchère et rizicole, dans la foulée du développement des filières. L’homme est ensuite choisi par ses collègues pour présider l’Union Régionale des Producteurs Horticoles au Trarza (URPHT), puis l’Union Nationale des Interprofessions de l’Horticulture (UNIH).