En ce début de semaine, la vie reprend dans une ville qui a encore les pieds dans l’eau. Nouakchott, la capitale mauritanienne, fait pourtant tout pour oublier son week-end de pluies, et les écoles de plusieurs quartiers périphériques ont repris les cours dans des salles de classe encore inondées.
Les premiers coups de tonnerre avaient claqué samedi 5 septembre à l’aube. Puis ce fut un véritable déluge et, jusqu’en milieu d’après-midi, des trombes d’eau se sont abattues sur la ville, rendant de nombreuses artères impraticables. Des quartiers entiers comme El Mina, Riyadh et Sebkha se sont retrouvés « complètement isolés, comme au milieu d’une mare », n’en revient pas Doumbia, un chauffeur de taxi.
Soumaré, un restaurateur qui devait récupérer des médicaments pour sa mère, n’a pas pu sortir sa voiture du 5e arrondissement. « J’étais entouré d’eau », raconte-t-il. Obligé de quitter le quartier à pied, il a pris un taxi « une fois sur le goudron ».
Les automobilistes qui s’étaient aventurés en centre-ville dans la soirée ont été obligés de faire demi-tour au milieu de flaques géantes, comme dans une chorégraphie savamment orchestrée, avant que des camions-citernes n’arrivent pour pomper l’eau dans différents secteurs de Tevragh Zeïna, un quartier du centre-ville.
Un record depuis dix ans
Nouakchott est une ville récente. La capitale, qui ne dispose pas de réseau d’égouts, a été construite autour d’un puits creusé en plein désert. Au début des années 1970, à cause des premières grandes sécheresses, elle a connu une croissance exponentielle qui perdure encore aujourd’hui. Ainsi, ces dernières années, la ville a grignoté sur des cordons lagunaires et plusieurs zones inondables.
En dix ans, Carlos Gil Casado, professeur d’agriculture, n’avait jamais vu autant de pluie se déverser sur cette ville pas vraiment préparée pour ce type de phénomène climatique. Près de 40 mm d’eau sont tombés dans ses plantations de légumes situées à Riyadh, une banlieue de Nouakchott. « Je suis inquiet, témoigne-t-il, car ces eaux stagnantes peuvent provoquer dans les jours qui viennent des maladies fongiques et bactériennes sur les plantes. »
Et si l’enseignant espère pouvoir limiter les dégâts, chez beaucoup d’autres le mal est déjà fait. Comme chez Tamimou Wayne, éleveur de poules et poulets qui a perdu plus de 200 poussins, et du même coup tout le bénéfice de sa production. Le jeune entrepreneur déplore que seuls « les plus chanceux ont pu se réfugier au sommet du poulailler quand les plus faibles se sont noyés », ajoute-t-il dépité.
Ces derniers jours, des pluies torrentielles se sont aussi abattues sur d’autres pays de la région. Au Niger, 33 personnes sont mortes et plus de 80 000 sont sinistrés. Au Nigeria, au Tchad et au Cameroun, des victimes sont aussi à déplorer. Le Sénégal, lui, a activé dimanche un plan d’aide d’urgence après que le pays eut enregistré plus de pluies sur la seule journée de samedi que durant une saison habituelle. Le Soudan l’avait fait la veille après la mort d’une centaine de personnes et la destruction de plus de 100 000 habitations, selon l’agence officielle Suna. Le niveau du Nil a atteint 17,57 mètres, selon le ministère de l’eau de l’irrigation, un record absolu depuis plus de cent ans, date du début des relevés sur le fleuve.
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