RMI Biladi - Le vice-président du groupe d’affaires BSA, Mohamed Ould Dabagh, vient de porter plainte en justice contre trois hauts fonctionnaires qui auraient manipulé le procès verbal de son audition, en 2013, devant la brigade de répression des crimes économiques.
Certaines filiales du même groupe envisagent de porter plainte contre des institutions publiques et les individus qui les dirigent –ou qui les ont dirigées- contre ce qu’ils estiment être un abus de pouvoir.
Un nouveau développement sans précédent dans la guerre ouverte qui oppose le propriétaire du groupe, Mohamed Ould Bouamatou, qui vit en exil à l’étranger depuis plusieurs années, et son cousin président Mohamed Ould Abdel Aziz.
Le bal des plaintes de BSA contre les fonctionnaires de l’Etat mauritanien a été inauguré par le vice président du groupe Mohamed Ould Dabagh. Ses avocats viennent de saisir la justice pour porter plainte au nom de leur client contre trois fonctionnaires de l’Etat : Sidi Ould Bab El Hacen, directeur de la sûreté de l’Etat ; l’ex procureur de la République, Cheikh Ould Bab Ahmed ; et le commissaire de police aujourd’hui à la retraite, Diarra.
L’affaire remonte à 2013. A l’époque, le pouvoir, qui avait décidé de s’attaquer aux intérêts de son ancien allié qui s’est exilé au Maroc, arrête Mohamed Ould Dabagh, le poursuit en justice, exactement comme cela a été le cas pour les gens d’Air Mauritanie, en l’accusant d’être derrière la faillite de la compagnie Mauritanie Airways.
Une compagnie dont son groupe est actionnaire aux côtés de la compagnie aérienne publique tunisienne, Tunis Air, et qui est tombée en faillite, sans donner d’alerte. D’ailleurs, les tunisiens qui l’avaient en gestion ont tout simplement pris la poudre d’escampette.
Le pouvoir qui voyait cette perspective arriver n’a pas levé le petit doigt en dépit des alertes qui lui étaient parvenues de part des actionnaires mauritaniens.
Ce n’est que lorsqu’il a retenu l’option de créer des problèmes au groupe BSA, qui est complètement sorti de l’orbite azizienne, qu’il s’intéressera au dossier deMauritanie Airways. Il poussa certains travailleurs à porter plainte contre la direction de l’entreprise.
Remake du scénario d’Air Mauritanie. Mais là, on n’arrête pas les gestionnaires, mais plutôt le dernier président du conseil d’administration, Mohamed Ould Dabagh, dont le mandat n’a pas dépassé six mois.
Le numéro deux de BSA croyait avoir servi loyalement son pays à la tête du conseil d’administration et s’attendait à une décoration pour services rendus à la nation plutôt qu’à un mandat d’arrêt pour des faits dont il n’est pas responsable. Il s’est donc trouvé obligé de lâcher ‘’le morceau’’ qui paraissait vraiment desservir les autorités.
Quel morceau ?
La réponse de Ould Dabagh à l’accusation ‘’grave’’ et ‘’grotesque’’ portée contre lui fut simple : les ‘’seuls actes de gestion que j’ai signés à Mauritanie Airwaysconcernent des actions top secrètes qui se rapportent à des secours à notre armée en difficulté, loin du pays, sur le territoire malien’’.
Il semble, en effet, que Mohamed Ould Dabagh avait mobilisé l’un des avions de la compagnie Airways afin de porter, tard dans la nuit, des militaires mauritaniens d’Atar vers Néma pour secourir les troupes mauritaniennes engagées dans une bataille féroce avec des éléments d’AQMI dans la localité malienne de Hassi Sidi.
La seconde mission révélée par Dabagh aux enquêteurs de la brigade financière se rapporte au transport de kérosène, à bord d’un appareil d’Airways, pour approvisionner les avions de l’armée mauritanienne en ‘’panne sèche’’ àTombouctou.
Quant aux autres missions secrètes menées par Ould Dabagh pour le compte du gouvernement, à bord des appareils d’Airways, elles concernaient la libération d’Omar Sahraoui contre celle des otages espagnols retenus par AQMI au Mali.
Toutes ces révélations ‘’gênantes’’ ont été consignées dans un procès verbal qui a été dûment signé par l’intéressé pendant sa garde à vue au commissariat de répression des crimes économiques.
Lorsqu’il a été déferré à la prison civile, il sera surpris de découvrir que le procès verbal remis à la justice n’était pas celui qu’il avait signé à la police. Il décida alors de porter plainte contre le commissaire Diarra pour manipulation de ses déclarations. Une plainte qui n’a jamais été instruite par le parquet.
Après le départ récent du procureur de la République, Dabagh décide de revenir à la charge pour porter plainte contre le commissaire Diarra et deux autres personnes qui, selon lui, avaient participé à la manipulation de son procès verbal.
Il est très peu probable que cette plainte soit instruite par la justice mauritanienne, mais restera tout de même au moins dans les archives et pourrait même être activée à n’importe quel moment. En Mauritanie ou ailleurs, ‘’dans ce vaste monde où des âmes nobles œuvrent inlassablement pour que justice soit rendue à chaque citoyen de la planète’’.
D’ailleurs, le groupe BSA entend bien exploiter cette brèche ouverte et a déjà déposé plainte au nom de la Fondation d’Ophtalmologie Bouamatou contre l’ex gouverneur de la BCM, Sid’Ahmed Ould Rayess et l’un de ses directeurs, Cheikh El Kebir, qui ont bloqué jusqu’à aujourd’hui un transfert de 400 millions d’ouguiyas offerts par Bouamatou à la fondation.
Deux autres plaintes de la part de AGM, la société d’assurance, et CGA, la représentation de Nissan, sont en train d’être déposées. Elles visent l’administrateur directeur général de la SNIM Mohamed Abdallahi Ould Oudaa et le ministère des Finances.
Amine Lazrag